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Le développement du pouvoir
Les pouvoirs d’être et d’agir sur soi

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Le pouvoir d’agir sur soi

     Le pouvoir d’agir sur soi est absent à la naissance et ne peut s'acquérir qu'au fur et à mesure du développement de l'autonomie et des ressources individuelles. Comme l’enfant ne peut évidemment pas faire l’objet de sa propre observation, il ne peut initialement agir de façon à modifier consciemment sa conduite par lui-même. Ce pouvoir d’agir appartient initialement aux parents qui en sont les possesseurs exclusifs puisqu’ils disposent seuls des pouvoirs de permissions et d’interdictions. Ce n’est que lors du passage à l’adolescence, alors que la maturation de la pensée permet l’abstraction et conséquemment la conscience de soi que l’enfant devient en mesure d’accéder à une maturité de maîtrise de son propre pouvoir d’agir sur soi, de se déterminer lui-même en fonction de décisions autonomes à propos de sa propre personne, pour autant que la crise pubertaire ait connu une résolution positive, bien évidemment, ce qui n'est malheureusement plus la règle.

     Au même titre que le pouvoir d’être, le pouvoir d'agir sur soi tire sa puissance des mêmes ressources fournies par l'instinct de l’agressivité. Si ces deux pouvoirs connaissent chacun différents paliers d’intensification, le pouvoir d’agir possède ceci de particulier qu'il s'inspire de différents niveaux de motivation. Si l’enfant peut graduellement agir sur sa conduite et en modifier certains aspects bien avant son adolescence, sa motivation demeure toutefois limitée aux peurs des conséquences de ses comportements, comme à l’âge de trois ou quatre ans lors de son passage à la phase de l’autoprotection, ou aux exigences du conformisme, comme à l’âge de six et sept ans. Ce n’est que lors de l’accession à l’adolescence que ce pouvoir d’agir sur soi devient en mesure de bénéficier du raffinement et de la puissance graduelle de la conscience de soi, pour s’alimenter dès lors d'une motivation liée aux exigences de l’image et l’estime désirées de soi. En d'autres termes, ce n'est plus la peur des conséquences ou le conformisme qui guident la conduite mais bien maintenant le besoin profond de se plaire à soi-même, le souci d'entretenir une expérience satisfaisante avec soi dans le respect de l'image et de l'estime désirées de soi. On oublie en effet et trop souvent que la conscience est le tribunal du face à face avec soi.

     L'importance de ces deux types de pouvoirs dans l'accession à la santé mentale permet donc de saisir un aspect capital de toute qualité d'éducation. Cette dernière doit permettre à l’enfant de conserver puis de raffiner son pouvoir d’être par la libre expression de soi et l’affirmation de soi, tout en l'amenant à réaliser l'apprentissage de l’inutilité de l’agression et de la violence dans des rapports humains où la survie est absente. Dans un second temps, ces mêmes conditions éducatives doivent permettre à l'enfant sa libre accession au pouvoir éventuel d’agir sur sa personne, c’est-à-dire de se doter d’un processus décisionnel conscient et axé sur la façon avec laquelle il entend maintenant disposer de lui, dans le respect de soi et des autres. Comme j’en discuterai lors d’articles subséquents, c’est à la fois la qualité de gestion de ces deux types de pouvoir et leurs interrelations qui permettent la compréhension du processus d’acquisition de l’identité ou à l’inverse, de la dilution de sa personnalité dans une structure de dépendance affective.

     Afin que le processus de développement de ces deux pouvoirs daigne s’accomplir, toutefois, il faut bien entendu que l’autorité parentale se conduise de façon à en permettre l’accomplissement. Ce processus de responsabilité éducative implique non seulement le maintien de la permission d’être soi à l’enfant tout au long de son développement mais également la remise graduelle du pouvoir d’agir entre ses mains, au fur et à mesure de son évolution vers la capacité de se gérer lui-même.

     Un tel processus ne voit jamais le jour dans les familles dysfonctionnelles où l’échec de cette mission éducative génère à l’inverse l’apparition de la peur d’être soi, au travers la présence d’anxiété, d’angoisse et de culpabilité. C'est lorsque cette peur d'être soi se substitue à la liberté et au pouvoir initial d’être soi que se développe le scénario constitutif de toute perturbation affective : la négation de soi assure dorénavant le maximum de confort affectif et le minimum de souffrance. En d'autres termes, lorsque l'enfant se bute à une interdiction d'être librement lui-même au travers une souffrance qui lui est imposée chaque fois qu'il transgresse cette règle, il ne lui reste qu'à remplir cette exigence afin de souffrir le moins possible; c'est ainsi qu'il réalise l'apprentissage toxique d'un bien-être maintenant axé sur la négation de sa personne et qu'il inverse ainsi les conditions initiales de sa naissance où ce sont la liberté et le pouvoir d'être qui guident la conduite.

     Outre son action perturbatrice sur le pouvoir d'être, la famille dysfonctionnelle refuse la remise du pouvoir d’agir sur soi entre les mains de l’enfant. Le maintien et l'exercice abusif de ce pouvoir par les parents, satisfaisant ainsi leur propres besoins à cet effet, véhicule donc une interdiction auprès de l’enfant de se déterminer lui-même et de se comporter différemment des attentes parentales. L'enfant ne peut donc accéder au pouvoir d'agir que lui permet pourtant sa croissance vers l'autonomie, ni en développer le plein raffinement, coupant dès lors tout accès à son identité.
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