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La dépression, ou le besoin d'être soi

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     Le type d’intervention favorisée par la médecine interdit malheureusement la cueillette de ces données, paralysant toute émergence de la conscience de soi et tout changement possible de la conduite à l’origine même de cette affection. Le patient demeure donc le plus souvent dans une parfaite ignorance de ce qui l’a conduit à cet état de douleur. « La substance agit directement sur les affects, mais, soulignent les psychanalystes, ne permet pas au patient d’élaborer son système de défense — du moins quand cette action ne s’accompagne pas d’un travail avec le patient qui est simultanément un travail du patient. Il se produit un court-circuit avec soi-même, au sens où le sujet n’est pas placé dans les conditions lui permettant de mettre par lui-même ses conflits à distance. »(1)

     Le second danger est bien évidemment lié aux effets comme tels de la médication. Dans un premier temps, soulignons que cette dernière est irrémédiablement nécessaire dans les cas plus graves, comme chez ceux et celles qui sont aux prises avec une permanence de l’idéation suicidaire ou avec une angoisse insupportable, ou qui en vertu de leurs dépressions successives ont assisté, impuissants, à la détérioration irrémédiable de leur équilibre affectif. Par contre, la lecture des différentes données statistiques entourant la consommation des antidépresseurs justifie l’affirmation d’un Fast Food de la santé mentale, comme si toute souffrance n’avait pas lieu d’exister.

     Or, l’accès potentiel à douleur est une condition incontournable de toute définition du bonheur, la présence de ce celui-ci correspondant entre autre à l’absence de toute souffrance, physique ou psychique. Une telle intervention contribue non seulement à priver le dépressif du décodage essentiel et nécessaire des messages à propos de lui-même que véhiculent ses affects (ce qui est ressenti) pour son rétablissement, mais également à normaliser et standardiser l’humeur à partir de critères extérieurs à la personne, provoquant de la sorte le danger d’un nivellement de l’état d'âme d’un peuple donné. « L’attitude médicale de départ doit consister autant que possible en un diagnostic global, un diagnostic de situation qui dépasse les critères médicaux traditionnels pour s’intéresser à la vie tout entière du sujet. »(2)

     La nature de ce danger prend tout son sens lorsqu’on applique cette logique de l’intervention à un problème d’ordre physique. Imaginons que vous vous êtes brisé une jambe lors d’une activité sportive. Sans prendre de radiographie pour déceler les sources du mal qui vous assaille (au chapitre de la dépression : aucun examen des causes et des origines de votre souffrance psychique), le médecin vous prescrit un médicament qui aura l’heur d’éliminer la douleur générée par la fracture de votre tibia (prescription d’un antidépresseur dans le but de taire la présence de votre souffrance affective), de sorte que vous pouvez continuer à marcher sur votre jambe (poursuite de la façon d’être qui vous a conduit à cet état).

     Bien sûr, vous boitez lors de chacun de vos déplacements (vous nourrissez les mêmes comportements) et vous en ruinez la condition (votre santé mentale se dégrade). En conséquence, comme votre affliction physique s’intensifie avec le temps, on devra le cas échéant accroître votre posologie (on augmentera la dose à chacune de vos rechutes afin de régulariser votre humeur). Quelle leçon tirer de ce parallèle? La médication exclusive maintient la personne emprisonnée dans son état dépressif en l’engluant dans la toxicité de sa conduite, permet l’intensification de la souffrance et coule les bases de futures rechutes potentielles.
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© Gilbert Richer. Tous droits réservés 2004 - 2012
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